26 avril 2013

Le Char Somua S35.


Somua S 35 vu de face, trappe du pilote ouverte.

Durant l'été 1940 l'armée Française, réputée la plus puissante du monde a subi ce qui est peut-être la plus grande défaite de l'histoire militaire.

Après tant d'années les plaies sont toujours ouvertes dans l'inconscient collectif français et en partie à cause de notre grande sensibilité et des querelles politiques chères à notre peuple les raisons de cette défaite restent obscures encore aujourd'hui.

Etant passionné de blindés j'ai décidé de vous parler d'un char emblématique de nos forces et faiblesses de l'époque, le char de cavalerie SOMUA S35.

En 1934 la cavalerie française lance un appel d'offre pour une "automitrailleuse de combat" d'un poids d'environ 13 tonnes et équipée de la tourelle apx 1 comportant un canon anti-chars de 47mm.

L'appellation automitrailleuse de combat alors qu'il s'agît d'un char de bataille est surprenante, elle résulte de la rivalité entre l'infanterie et la cavalerie, je vous avais dit que ce char était emblématique de notre pays !

En effet, selon la doctrine de l'époque la cavalerie a principalement pour mission de reconnaître les forces adverses et ses mouvements, elle est donc équipé d'automitrailleuses à roues.
L'infanterie quant à elle se chargera d'attaquer et de détruire l'adversaire à l'aide de chars plus lents et équipées de canon anti-personnels, accompagnés par les fantassins, absolument comme en 1918 pendant les guerres de tranchées.

Or un char de bataille coûte beaucoup plus cher qu'une automitrailleuse et l'infanterie n'aurait jamais accepté que des fonds trop importants soit alloués pour un tel matériel destiné à la cavalerie.

Cependant le réglement ne stipule pas que les blindés de cavalerie doivent être à roues et leur poids n'est pas mentionné, c'est donc grâce à ce tour de passe passe sémantique que la cavalerie se verra équipée du plus puissant char de son époque.

C'est la société "SOMUA"  Société d’Outillage Mécanique et d’Usinage d’Artillerie qui réalisera et produira ce char modèle S 35.

Sur le papier il s'agît d'une véritable merveille, d'un poids final de 19,5 tonnes, l'engin est mû par un moteur hispano suza d'une puissance de 190 ch qui permet une vitesse de 40 km/h sur route et une autonomie de 230 kms.
Somua était avant tout un fabriquant de camions et ses moteurs bien que puissants n'étaient pas assez solides pour propulser un char, la société à donc dû acquérir les droits pour un moteur de l'un de ses concurrents.

Le blindage frontal est de 40 mm en caisse et 50 mm en tourelle
, de plus il est incliné ce qui favorise les ricochets et le rend pratiquement invulnérable aux obus des panzers.
Le canon d'un calibre de 47 mm à volée relativement longue propulse les obus à une vitesse suffisamment élevée pour percer tous les blindages allemands, aux distance usuelles de combat, une mitrailleuse co-axiale de type Reibel à chargeur tambour de 150 coups de 7.5mm complète l'armement.

Passons maintenant en revue les très grands défauts de notre meilleur char qui vont grandement amoindrir ses performances au combat.

L'équipage se compose de 3 hommes seulement à savoir:

-Un pilote 
- Un radio-chargeur
-Un chef de char, chargeur, pointeur et "agiteur de drapeaux".

Dans "radio chargeur" il y a "radio" or, seuls les chars de chef de peloton en seront équipés, c'est à dire un blindé sur 5, cette radio est destinée à communiquer avec le chef de  régiment.
Pour la communication entre chaque char une radio plus petite placée dans la tourelle était prévue mais la place manque, une modification était donc nécessaire  sous la forme d'un coffre blindé situé à l'arrière de la tourelle mais l'offensive allemande du printemps 40 arrivera trop tôt. De toute façon la plupart du temps les équipages avaient interdiction d'utiliser leurs rares radios afin de ne pas donner d'informations à l'ennemi (!!!)

La tourelle est monoplace et le chef de char est bien occupé, en effet celui-ci doit donner les ordres au pilote, repérer l'ennemi puis charger le canon, viser et tirer. Il doit ensuite prendre un obus tendu par le chargeur situé en bas et donc perdre la cible de vue puis recommencer les opérations. Sachant que l'équipage d'un panzer comporte 3 hommes en tourelle on imagine facilement à quel point un "bordführer" allemand a la tâche plus facile.

Cerise sur le gâteau, quand le chef de char est également chef de peloton il a également pour tâche de donner les ordres aux 4 autres blindés mais comment faire sans radio ?

Le règlement a penser à tout, le chef de peloton ouvre la trappe de la tourelle derrière lui puis sortant le buste il agite des fanions suivant un code précis, comme au moyen âge, tout en espérant que ses subordonnés le voient au milieu de la fumée, des explosions et des attaques de Stukas.

Dans la pratique Les S35 seront le plus souvent isolés au milieu du tumulte de la bataille et après avoir détruit les premiers panzers, ils seront flanqués puis tournés par ceux-ci et détruits par le flanc ou l'arrière.

Ainsi le génie français qui aura donné naissance à une merveille technologique sera comme trop souvent, gâché, neutralisé par des têtes pensantes haut-placées trop loin des réalités du terrain.











Vue arrière avec la trappe du chef de char ouverte.



Gros plan sur l'excellente tourelle et son puissant canon.



Place du radio-chargeur avec le casier à munitions.

J'aimerais remercier le musée des blindés de Saumur et le Capitaine Rimaud pour une visite inoubliable durant laquelle j'ai pu prendre ces photos.
Je recommande à tous la visite de ce musée qui expose l'une des plus grandes collections de blindés au monde et probablement la plus belle.

Par saint Georges vive la cavalerie !

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