Je souhaite à tous mes compatriotes une bonne fête nationale.
J'espère que vous n'avez pas été touchés par la crise économique, que votre voiture n'a pas brulé et que vous avez échappé aux ivrognes bagarreurs des bals du 14 juillet.
Celà fait une semaine que je me creuse la tête pour trouver quoi écrire en cette occasion, je ne sais plus vraiment ce qu'être Français signifie je dois dire.
D'une part il est difficile de décrire son pays et son peuple, 60 millions d'habitants celà fait beaucoup d'individus différents.
Les signes extérieurs de patriotisme sont devenus politiquement suspects, la religion n'entre plus en compte, il reste les 35 heures, la sécurité sociale et les dimanches chez ikea comme valeurs morales.
Pourtant j'aime bien la culture et le caractère "Gaulois" typiquement de chez nous, il est fort bien décrit dans la BD "Asterix", à tel point que je ne sais plus quel entraineur d'une équipe de rugby étranger en a imposé la lecture à ses joueurs pour qu'ils comprennent notre mentalité.
Le Français est râleur, il attend beaucoup de son gouvernement par exemple, il est conservateur et méfiant, les nouvelles technologies arrivent toujours plus tard chez nous, internet en est un exemple même si nous avons rattrapé notre retard dans ce domaine. Nous avons vécu notre révolution industrielle avec beaucoup de méfiance car je crois que nous sommes attachés à la qualité de vie avant tout.
Le Français passe beaucoup de temps à table, je n'aime ni le fromage ni le vin mais je me réjouis toujours de voir mes compatriotes savourer leur ignoble fromage nauséabond et leur liquide rouge amer tout en racontant un tas de blagues et en riant fort.
Quand je travaillais dans le tourisme, on m'avait expliqué, pour préparer des excursions, que les américains voulaient un confort absolu dans les hotels et les cars ainsi que des toilettes impeccables dans les restaurants, les Français quant à eux, veulent une bonne ambiance avec des accompagnateurs sympathiques et surtout, de bons repas !
Même les pyramides seront moches pour eux si le repas n'était pas à la hauteur !
Je pense que nous avons beaucoup d'humour, je m'en rends compte lorsque je joue à un jeu en ligne "battleground europe", un mmorpg au rythme assez lent, ce qui laisse le temps d'utiliser intensivement le chat.
Les Français sont beaucoup plus bavards que les autres joueurs d'après ce que j'en ais vu, comparé aux Allemands, anglo saxons, Italiens, espagnols ou scandinaves, les blagues fusent à une vitesse folle alors que les autres recherchent la performance avant tout, nous recherchons l'amusement total.
Mes compatriotes sont également les seuls à avoir crée plusieurs squads ou clans distincts dans le jeu qui se détestent cordialement, pourtant si un étranger s'en prend à l'un d'entre nous les Français se serrent toujours les coudes.
Ils sont marrants ces Français, ils adorent se détester mais ne toléreront jamais qu'un étranger ne critique leur adversaire.
Dernièrement une amie Mexicaine vivant à Paris dans un quartier très cosmopilite m'a demandé ce que signifiait être Français, car pour le moment elle n'en avait pas vu grand chose.
J'étais bien dans l'embarras mais il m'est venu rapidement en tête que le Français était épris de justice sociale comme l'on dit maintenant, je dirais plutôt que mon peuple exige que tout le monde ait à manger.
Les nombreuses jacqueries du moyen-âge, la révolution durant laquelle nous avons coupé la tête de notre roi qui n'était pas si mauvais, à chaque fois les assiettes étaient vides depuis trop longtemps.
Notre terre nourricière a toujours été généreuse pour nous et notre art de vivre en découle certainement.
La protection sociale très développée chez nous vient probablement de cet esprit de justice qui anime les Français et je suis certains que la plupart de nos explorateurs durant les périodes de colonisation avait dans l'idée de faire profiter les peuples moins riches de notre qualité de vie.
C'était une erreur car ces peuples n'avaient pas besoin que nous leur construisions des routes, des écoles, de faire stopper les guerres tribales...
Ils vivaient de cette manière depuis des siècles, et l'homme blanc est venu avec sa suffisance leur expliquer qu'ils étaient malheureux, celà partait d'un bon sentiment mais ce fut un échec et celà nous a couté tellement cher !
Afin d'endiguer ce sentiment de déracinement qui m'assaille fréquemment, je pense souvent à mon grand-père maternel, grand patriote, homme de bien et foncièrement honnête.
Né en 1898, (comme le mauser) à Reims "Georges" était issu d'une famille des classes moyennes, son père était directeur dans une fabrique de pneus (utilisant le caoutchouc d'Indochine l'une des rares colonies qui ne nous coûtait pas d'argent) sa mère s'occupait de ses nombreux frères et soeurs.
Croyant et patriote, il s'est porté volontaire en 1914 dès que la guerre à été déclarée aux prussiens, comme on disait à l'époque. Il n'avait pas encore 18 ans et a dû tricher sur sa date de naissance.
Le recrutement à dû prendre du temps car sa mère inquiète de ne pas voir son fils arpentait les rues du quartier dans l'espoir de le trouver, c'est lorsqu'elle croisa des amis de celui-ci qu'elle apprit la nouvelle:
"Avez-vous Georges ? s'enquit-elle, inquiète.
- Georges, mais il s'est engagé, il est au bureau de recrutement, il ne vous a rien dit ?"
Mon grand-père va vivre les 4 années d'enfer comme la plupart des jeunes gens de sa génération, muté dans l'infanterie, il sera placé aux cuisines au départ car sa constitution n'inspirait pas confiance aux recruteurs qui le trouvait trop maigre et faible pour endurer la vie en première ligne. Il était très aimé des hommes de son régiment car il leur préparait du riz au chocolat et pour eux, c'était jour de fête à chaque fois.
Georges va passer beaucoup de temps dans les tranchées, il vivra la boucherie de Verdun entres autres batailles dévoreuses de vies.
Il ne sera que légèrement blessé durant la guerre mais aura les pieds gelés, ce qui le fera souffrir toute sa vie.
Il n'a jamais parlé des horreurs qu'il a pu voir mais mentionnait souvent les rats qui courraient sur les soldats pendant qu'ils éssayaient de dormir dans leurs abris de tranchées froid et humides.
Pourtant il n'a jamais regretté de s'être engagé, il s'est battu pour son pays car il estimait que c'était son devoir c'est tout.
Je suis toujours choqué lors de chaque cérémonies du 11 novembre ou pendant que je regarde des émissions sur la première guerre mondiale.
On y glorifie les mutinés, on pleure sur le sort de nos pauvres soldats avec un une voix éprise de pitié, c'est une insulte à leur mémoire, même durant les mutineries les soldats ne demandaient pas qu'on les plaigne, seulement que l'on comprenne leur calvaire et que l'on améliore leur quotidien.
Pourtant la majorité d'entre-eux vivront toutes les horreurs de cette guerre sans esprit de reddition, sans jamais céder, ces générations brisées par le destin ont tout donné pour leur pays et leur peuple et ils en étaient fiers.
Mon grand-père n'a pas gardé son casque adrian qui était offert à chaque poilu malheureusement, je pense qu'il ne voulait plus y penser.
La "der des ders" étant enfin terminée, Georges a crée sa caoutchouterie puis s'est marié et aura 3 enfants.
Son entreprise comptera jusquà 80 employés, puis vint la seconde guerre mondiale...